Elana Toruń - Widzew Łódź

Toruń est souvent qualifiée d’une des plus belles villes de Pologne. J’ai longuement attendu le moment opportun pour la visiter afin de la coupler avec un match de l’Elana Toruń local. Pour ma visite en Pologne, j’avais choisi cette semaine fin septembre pour profiter des matchs de coupe de Pologne pendant la semaine. Le tirage au sort n’a pas été favorable mais ce match était la (très) parfaite exception : l’Elana Toruń que je souhaitais faire depuis bien longtemps allait recevoir leurs amis du Widzew Łódź, ces derniers faisant partie du très haut gratin en termes de supportérisme en Pologne.
La ville
Située au nord de Łódź et à l’est de Poznań, Toruń est une ville inscrite à la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 1997. En citant l’UNESCO, sa valeur réside dans le fait d'être « une petite ville commerciale historique qui préserve à un degré remarquable ses rues et ses bâtiments dans son état originel, et qui donne une image extrêmement complète du mode de vie médiéval ». Une description que je ne peux effectivement pas réfuter.


Les bâtiments sont effectivement très bien conservés et la ville a un charme indéniable dont la puissance dépendra de votre sensibilité.


La ville est également la ville de naissance du célèbre astronome polonais Nicolas Copernic. Vous pouvez visiter la maison de Nicolas Copernic, dont la visite a avant tout pour but de découvrir la maison de l'astronome et les coutumes typiques de l’époque (XVème siècle).


Vous pouvez également aller voir un film de 45 minutes au planétarium :

Ou visiter les expositions de l’hôtel de ville et monter au sommet de la tour pour une belle vue sur la ville et ses très beaux toits rouges :



Le soir, baladez vous dans la vieille ville après avoir admiré un beau coucher de soleil le long de la Vistule (ou Wisła en polonais, qui traverse également Varsovie et Cracovie) :


J’ai eu la surprise de voir beaucoup de groupes d’enfants en voyage scolaire dans les différents lieux de la ville. C’est une ville plutôt touristique pour sa taille : environ 2 millions de visiteurs par an pour une ville de seulement 200 000 habitants. Le musée du pain d’épice, spécialité régionale, vaut également le détour. Personnellement, je place la ville dans un bon top 6 en Pologne. J'ai logé à l'Ibis Budget Toruń qui est très bien situé.
Enfin, comme dans chaque ville polonaise, les supporters de l’Elana ne dérogent pas à la règle et affichent leurs couleurs jaunes et bleues ainsi que leurs nombreuses amitiés sur les murs.




Le match
J’ai longtemps cru que ma première visite à Toruń serait à l’occasion d’un derby face au Zawisza Bydgoszcz. C’est le match polonais « de basse division » par excellence si vous souhaitez goûter aux divisions inférieures en Pologne. Vous pouvez même privilégier Zawisza – Elana car la fanbase semble même encore plus puissante à Bydgoszcz. Les deux équipes évoluent actuellement dans le même groupe en 4ème division.
Finalement, la réception du Widzew Łódź pour ce 1er tour de Coupe de Pologne est une encore plus belle opportunité et permet d’offrir à Elana un match historique : 23 ans que l’Elana Toruń attendait d’affronter à nouveau une équipe de 1ère division !

L’attente fut également (bien trop) longue pour obtenir le billet. N’ayant pas de billetterie en ligne, j’ai bien cru que ce match « de gala » serait à guichets fermés (stade d’une capacité de 6 000 places) avant même que j'atterrisse en Pologne. Finalement, j’ai pu me procurer le précieux sésame en arrivant la veille et le match n’a finalement pas fait les guichets fermés, sans doute dû à un début de saison très poussif des locaux en championnat et le très mauvais horaire : un mardi à 17h30.

Cela n’a en tout cas pas dérangé les supporters du Widzew Łódź. Après 2h de route pour un match en plein après-midi en milieu de semaine, ce sont pas moins de 2500 supporters de « l’Armée rouge » qui ont envahi la ville de Toruń aujourd’hui pour ce match « amical » ! Vraiment impressionnant.

C’est un match « amical » car ces deux clubs font partie de sans doute la plus grosse alliance de supporters du pays : la WRWE. Reprenant les premières lettres des clubs concernés (Widzew Łódź, Ruch Chorzów, Wisła Kraków, Elana Toruń), cette alliance est sans doute celle suscitant le plus de crispation et de haine vis-à-vis des autres alliances. Elle reste toutefois assez « jeune » avec des liens qui ne dépassent pas les 15 années.
Ruch et le Widzew sont en accord depuis 2005. Elana a noué ses relations avec le Ruch en 2011 et avec le Widzew depuis 2018. Lors de la saison 2018/2019, le Ruch Chorzów, Widzew Łódź et l’Elana Toruń étaient ensemble en 3ème division, ce qui a contribué à renforcer les liens.

Au prix d’une trahison immense envers leurs anciens amis (Śląsk Wrocław et Lechia Gdańsk), le Wisła Kraków les a rejoints vers 2016 avec un lien aujourd’hui très fort avec le Ruch Chorzów notamment. Ce mouvement fut indéniablement le plus grand évènement de la scène polonaise du XXIème siècle.
Les matchs impliquant toutes ces équipes permettent d’observer la démesure pyrotechnique à l’image du Wisła – Ruch du 16/09/2022 ou le légendaire Ruch – Widzew de la saison 2023-2024 se jouant devant plus de 50 000 spectateurs (record dans le pays au XXIème siècle) et avec plus de 20 000 supporters du Widzew ! Rappelons que le Widzew a un stade de capacité de 17 000 places…
Du point de vue fans, Elana est bien entendu bien en-dessous des 3 autres. C’est également un club au très faible palmarès sportif : ils ne sont jamais montés en Ekstraklasa et n’ont joué que 4 pauvres saisons en 2ème division dans les années 90. S’ils sont si bas, c’est bien entendu en raison des très nombreux problèmes financiers que le club essuie depuis toujours. Actuellement en 4ème division, ces questions sont encore d’actualité et la venue du Widzew permet d’engranger des recettes nécessaires à sa survie.

Le match démarre et l'Elana Toruń créé la surprise en ouvrant le score à la demi-heure de jeu ! L'avantage au score est conservé jusqu'à la mi-temps.
La première chorégraphie intervient logiquement en deuxième mi-temps afin d'attendre l’obscurité. « Une amitié sincère se révèle dans les moments difficiles » est le message affiché ponctué d'un craquage de fumigènes.



Le Widzew égalise quelques instants plus tard. 1-1. Côté météo, l'orage au-dessus de nos têtes est menaçant et gronde. Une dizaine de minutes plus tard, sous le déluge, les ultras proposent une seconde chorégraphie avec cette fois-ci le message « On arrête les matchs, on déplace les foules » qui est écrit en lettres transparentes. Le craquage derrière la banderole permet d’afficher les lettres et des fusées / feux d’artifices sont envoyés au ciel.



Le match est effectivement arrêté mais vu la situation, c'était sans doute le temps de laisser passer l'orage, plus que pour les feux d’artifices ! Les bâches ont du mal à rester en place mais les chorégraphies se déroulent sans problèmes : grand respect à tous ces supporters restés dans les tribunes sans aucun moyen de s'abriter. Dans le money-time, le Widzew va finir par faire respecter la logique des choses en reprenant l'avantage à la 87' et en clouant le suspense à la 90'+3. Je vous avoue ne pas avoir eu trop de regrets d'avoir loupé une prolongations avec ces conditions climatiques.
Du point de vue sonore, je suis un poil déçu. Uniquement en terme de "volume" car les chants étaient bien présents tout le long du match sans interruption. Ceci est directement lié à la forme du stade : la piste d’athlétisme m’éloignant considérablement des ultras et l’absence de toit ou autres structures permettant d’amplifier le son des chants. J’avais eu la même petite déception dans l’ancien stade du Ruch Chorzów, en CR sur le site également.
Ma place (placement libre) sous les abris étant plutôt convoitée, je ne me suis pas amusé à la laisser pour me balader le long des tribunes pendant le match. Après le match, un passage à la buvette pour un "casse-croûte" typiquement polonais s'impose et le manger sur place pour retrouver un peu de calme et voir les gens quitter le stade.
Les clubs polonais sont régulièrement en proie aux problèmes financiers rendant parfois le futur de certains clubs très incertains. La situation étant telle à Toruń actuellement que les joueurs ne reçoivent qu'une moitié de salaire et que les dirigeants du club comptent sur les revenus générés sur les gros matchs pour renflouer les caisses. Le président a promis que les problèmes seraient réglés à la fin de l'année.
Ces moments ne sont donc pas éternels et je profite pleinement de l'instant.


