Tokyo Verdy - Urawa Reds (Japon 2/8 : Tokyo et le pire de la Société japonaise ?)
Mon vol
Comme à peu près tout le monde, j’ai commencé mon voyage par Tokyo. L’occasion d’en placer une pour Air China avec qui le voyage s’est bien passé. Leur site est nul à chier donc enregistrement sur place. Mon sac de 10 kg (au lieu de 5) n’a pas été contrôlé donc aucune mauvaise surprise si ce n’est les contrôles de sécurité excessifs et peu aimables sur l’escale en Chine, le blocage des réseaux sociaux américains sur le téléphone. Cela ne donne surtout pas envie de visiter ce pays, une escale c’est déjà assez à supporter.
Contextualisation :
Saison touristique et surtourisme
Je vais parler de Tokyo dans deux comptes rendus, donc l’idée n’est pas d’être exhaustif dès celui-ci. Et même, ce n’est pas en seulement 3 semaines de vacances au Japon que je peux détenir la seule vérité. Il y’a d’innombrables facteurs qui ont pu jouer sur mon rapport à Tokyo et encore plus aux autres villes : la saison touristique, le jour de la semaine, le moment de la journée. Il y’a tellement de manières de découvrir le Japon que personne ne peut avoir une expérience identique. En général, je suis allé deux ou trois fois dans un quartier, tout au plus, pour découvrir les quartiers les plus iconiques de jour et de nuit. C’est forcément court mais c’est en même temps l’expérience d’un touriste qui n’est là que de passage.
Ma chance, je pense, par rapport aux critiques qu’on lit partout sur le surtourisme, c’est d’y avoir été fin septembre - début octobre. Le mois de septembre est le seul mois de l’année avec moins de 3M de touristes au Japon. A quel point ça a pu avoir un impact sur mon expérience ?
Je reviendrais précisément sur le tourisme quand c’est nécessaire, mais globalement j’étais tellement préparé au pire, à ne pas le supporter (le touriste qui se plaint du tourisme), que j’ai trouvé ça relativement tranquille sur mon voyage. Il y’a un fait assez récurrent : il suffit de se déplacer de 50 mètres d’un axe touristique principal pour être purgé de 90% des touristes qui respectent un plan à la lettre ou qui ne peuvent/veulent pas faire les efforts physiques (escaliers, longues marches, etc). Et ce n’est pas comme si le Japon n’était joli que sur quelques axes principaux. Ce n’est de toute façon pas face à la population de Tokyo que les touristes se font le plus ressentir.
Les restaurants
Et concernant les restaurants, sauf quelques exceptions qui ne s'appuieront pas seulement sur mon avis, je ne vais pas faire le mec des avis google “c’est le meilleur restaurant de ramen de la ville” alors qu’on va parler avec Tokyo (20x la superficie de Paris), Osaka (plus grand que Paris) et Kyoto (seulement 1.4M d’habitants) de villes dont l’offre alimentaire est illimitée. De toute manière, je ne pense pas qu’on puisse mal manger au Japon, ni à mauvais prix. Ce n’est pas dans leur culture de faire n’importe quoi et d’appâter le chaland.
La perception du goût est très influençable par nos sens. Et là-dessus, j’attache beaucoup la qualité d’un repas à l’atmosphère qui l’entoure. Donc j’ai quelques règles tout à fait personnel :
- Pas de restaurant sur un axe touristique principal.
- Pas de restaurant dont la devanture met en évidence le menu en anglais (ou pire, qui précise que les touristes sont les bienvenus).
- Pas de restaurant dont le menu est trop varié. Plus l’offre est limitée, mieux c’est.
- Pas d’attente parce que je déteste être le client au service du commerçant.
Manger à Tokyo ?
En l'occurrence, à Tokyo je ne vais surtout pas m’étaler sur les restaurants. On a été incapable de trouver des restaurants sur nos premiers jours parce qu’enfaite, il y’avait la queue partout. Vous observerez dès votre arrivée que les japonais ont une énorme passion pour faire la queue, que ce soit des restaurants, l’ouverture d’un magasin ou d’une salle de pachinko, etc. Des restaurants avec même pas 10 places, car c’est principalement le cas des restaurants au Japon, et des files d'attente avec deux fois plus de personnes. La grosse flemme. Et puisque c’est plein, même si vous avez un siège c’est pour finir au comptoir dans un cadre que je n’apprécie pas trop. Pour mieux s’en sortir, il faut manger en dehors des heures ordinaires de repas (par exemple 11h et 17-18h).
Alors sur Tokyo, j’ai fait pas moins de 4 Sushiro (là-aussi, au mauvais moment c’est 45-60 minutes d’attente). D’après les critiques, c’est la meilleure chaîne de sushis à plateau tournant. A partir de 150 yens les 2 sushis, pour une dizaine d’euros on peut s’en enfiler une vingtaine et s’offrir un dessert avec ça. Une offre variée qui évolue chaque semaine avec des exclusivités selon chaque restaurant. Sur les 4 que j’ai fait, j’en ai ainsi vu 3 assez différents. Au-delà de l’offre alimentaire qui évolue, il y’a également la décoration (Sushiro Ikebukuro Sunshine 60 très kawaii) et la prise de commande qui peuvent différer (tablette, grand écran tactile). De quoi renouveler un peu l’expérience. Ça va me manquer.
Comme je l’ai dit dans la première partie, j’avais beaucoup d'événements sur Tokyo donc j’ai souvent mangé sur les lieux des événements. Puis je finissais les soirées avec un complément au 7 Eleven. Ce n’est pas ce que je recommande idéalement (offre relativement faible, surtout le soir, et jamais de promo) mais on ne peut pas y échapper après 22 heures.
Sinon, sans avoir à citer de restaurants en particulier, je crois que mon plat préféré ce sont les okonomiyaki. J’ai trouvé ça si bon les deux fois où j’en ai pris.
Une société qui favorise l’isolement social ?
J’ai tourné autour du pot sur la partie précédente. C’est l’occasion d’y venir. Je suis désolé car j’écris mes CR comme les choses me viennent en essayant de connecter les parties entre elles. Et j’avais pas l’intention de débuter par des points négatifs. Mais j’ai jamais l’intention de les cacher non plus.
L’isolement, c’est le constat quasi immédiat que j’ai pu me faire dans la société dans son ensemble, mais surtout à Tokyo. Et dont aucun “admirateur du Japon” ne semblait parler. Pourtant, ça m’a tellement sauté à la gueule.
Les restaurants sont petits donc peu conçus pour partager une table, peu d'échanges et aucune marque d’affection en public, les salles de jeux et surtout de pachinko (croisement entre le flipper et la machine à sous) sont pleines à toute heure de la journée, et se jouent exclusivement seuls. A noter que le pachinko détourne astucieusement (et je suppose avec la complicité de l’Etat) l’interdiction des jeux de hasard au Japon : pour la faire courte, au pachinko on ne gagne pas de l’argent mais des prix qu’on peut échanger contre de l’argent. Les japonais sont d’ailleurs fans de toutes les conneries de jeux (gacha) pour gagner des figurines, peluches, etc. C’est comme les distributeurs à boissons, y’en a partout.
Partout où j’ai été, y compris sur les événements sportifs ou les concerts, j’ai trouvé que le taux de personnes qui vivent ce moment seul étonnement très élevé voire majoritaire. Alors attention, j’aime aussi ce principe. Je suis moi-même un fort partisan du “je fais ce que j’ai envie de faire.” Mais quand je fais ça, je ne constate quasiment personne dans mon cas. Notre culture est plutôt de se priver de faire quelque chose si personne d'autre ne peut partager ce moment avec nous. Mais cela représente un risque sur notre solitude.
Par exemple, selon des études de 2018, le “pourcentage de ceux qui n’ont personne à qui demander conseil” était deux fois plus élevé au Japon (19,8%) que la France (10,8%) qui n’était déjà pas le bon élève du sondage. Et pour la Corée du Sud, 12,2%. On ne s’étonne donc plus que ce soit le pays qui ait inventé la location d’amis et petits amis, etc.
En conclusion, le Japon est le pays par excellence pour partir en vacances seul. Vous vous fondrez parfaitement dans l’environnement en n’ayant aucune interaction sociale. Félicitations.
Les interactions avec les japonais
Là-dessus j’étais prévenu par internet. Mon ressenti l’a plus que confirmé : c’est difficile d’avoir une interaction avec un japonais. Ce n’est évidemment pas qu’ils soient méchants. Ce sont les règles et exigences qu’ils semblent s’imposer (peur de déranger, de mal faire), etc.
En les observant déjà entre eux, de toute façon on n'est pas surpris. J’ai souvent eu l’impression de voir des PNJ d’un jeu vidéo. Les comportements sont scriptés, déshumanisés. Les mêmes propos, la même formule de politesse à répétition qui se déclenche en même temps sur chaque employé. Et dès qu’on sort de ce script avec une question imprévue dans leur logiciel cérébral, c’est le bug. Le niveau d’anglais cataclysmique est peut-être une partie de la justification. Mais je vous jure, je dois donner des exemples.
Dans un restaurant d’environ 6 places (toutes au comptoir), il a fallu plus d’une dizaine de minutes avant qu’un employé nous dise de scanner un QR Code pour passer commande. Un QR Code en japonais, donc strictement impossible à deviner. D’autant plus qu’un QR Code pour répondre à un sondage (inutile) était lui en anglais. Pourquoi ? Et ok c’est pratique de commander sur une borne ou un téléphone, mais gérer un restaurant de 6 places qui proscrit les interactions sociales alors qu’on se fait face, c’est une folie. Et pourtant commun au Japon. Tokyo est la ville qui pousse à l’excès chacun des défauts.
Avec un commerçant/vendeur/hôtel, bien que celui-ci sache que vous ne parlez pas japonais (car la première interaction sociale vous permet théoriquement de le savoir ?!?), il continue à vous dire et répéter des phrases en japonais. C’était la situation la plus commune. J’ai voyagé j’ai jamais connu des séquences aussi ubuesques. Ils peuvent persister longtemps sur une communication inefficace car c’est leur méthode théorique de travail.
Plus marrant, les employés de l’hôtel qui sortent en même temps pour nous souhaiter bon voyage. Situation burlesque dont eux n’ont pas conscience parce qu’ils sont dans l’excès permanent de politesse. Y’a des lieux où on nous a souhaité “au revoir” à répétition parce que le commerçant doit avoir le dernier mot.
A noter qu’en parallèle, un ami m’a appris un truc que j’ai vite remarqué dans les avis sur les hôtels ou restaurants sur Google :
Les japonais sont sévères et n’osent probablement pas traiter un problème directement. Donc vous ne pouvez pas vous fier uniquement aux notes Google pour juger un hôtel ou un restaurant. En gros, une note de ⅗ donnée essentiellement par des japonais est plus positif qu’un ⅘ qui serait donné par un public européen. Pour les restaurants, j’allais donc de temps en temps vérifier les notes sur leur site populaire tabelog.
Une société perverse ?
Vous ne pouvez pas fréquenter les principaux quartiers du Japon le soir sans échapper à la mise en avant d’une perversion sexiste et malsaine. Il y’a même une sexualisation grave des corps juvéniles dans l’espace public. Les affiches recouvrent des bâtiments d'illustrations de filles/femmes dénudées avec d'énormes seins (toujours).
Le Japon entretient un flou juridique sur la pédopornographie concernant les personnages virtuels ou par IA, contrairement à la France. Il y’a d’ailleurs eu un cas récent : Un haut cadre du football japonais condamné en France pour détention et visionnage d'images pédopornographique dans un avion.
Sinon en vrac : les publicités sur les clubs privés, le concept de maid café (serveuses en uniforme de domestique), les idoles, les filles le soir qui servent à allécher les hommes dans l’un de ces clubs/cafés, etc.
Vous mettez les pieds dans un Book Off (plus grosse chaîne de magasins japonais de vente d’occasion) et vous tombez sur d’innombrables rayons de mangas et figurines perverses, dont les "Kit de modèle en plastique scanné en 3D à l'échelle 1/20", de DVD érotiques à côté des blu-ray sur les trains : les japonais, les "densha otaku", adorent ça. Et évidemment le rayon -18 derrière des rideaux.
A noter qu’on m’a refusé l’entrée à 10h30 dans un sex-shop car “le magasin est fermé” avec des japonais dedans et qui continuaient d’y rentrer. MDR.
J’avais l’impression d’être dans une dystopie. C'est un environnement très contradictoire entre les usages et coutumes imposés pour former "le citoyen/employé idéal", d'une société prête à vous humilier publiquement au moindre écart de conduite (ci-dessous, le chien d'une maîtresse qui a pissé sur un poteau), et en parallèle la déviance et l'immoralité de la société japonaise pour sexualiser en permanence les corps féminins et même enfantins. Ce double jeu m'agace.
Un pays qui résiste encore et toujours au dématérialisé.
J’ai également essayé de raisonner différemment pour comprendre et apporter de la nuance. Le Japon est le pays au Monde qui résiste le plus au dématérialisé. Finalement, en Europe et Amérique est-il devenu assez facile d’isoler et de cacher la même perversion à travers l’existence de l’offre infinie sur internet ? Là où au Japon on la laisse s’exprimer naturellement et légalement en public grâce à une offre physique ? Y’a forcément un impact visuel défavorisant le Japon dans mon ressenti. Mais la sexualisation des corps juvéniles dans l’espace public, c’est association immédiate et légitime à la pédophilie chez nous. Et ça n'aide pas à changer les comportements. Là où la France et l'Europe continuent de faire des efforts (contrôle de l'âge/identité, etc).
Sur leur amour de l'objet physique, les commerces de figurines (y'en a bien trop), vente de jeux, films d’occasions sont là pour en témoigner. L’offre est exceptionnelle. Par exemple mon royaume : Tower Records Shibuya (mais y’a d’autres magasins partout à Tokyo et au Japon) : 9 étages et 5000 mètres carrés dédiés à la musique physique, en CD, en cassette vidéo, en vinyle. Vous pouvez tout avoir, tout leur demander. Il est probable qu’ils aient ce que vous cherchez. Je me suis procuré sur demande un vinyle du groupe chinois Hiperson, des CD/coffrets d’artistes coréens dont des éditions limitées. Il est ironiquement plus facile de se fournir chez Tower Records au Japon d’artistes coréens qu’en étant à Séoul (le physique n’existe plus). Et probablement pareil pour des artistes occidentaux/américains en Europe. D’où les versions japonaises exclusives parfois publiées par des artistes et groupes.
On le comprend mieux quand on sait que le Japon est le deuxième plus grand marché de la musique du Monde et que le physique y reste la meilleure source de revenue des artistes même si ça tend à se réduire avec le streaming. J’ai même assisté à un concert chez le disquaire Union Disk Jazz avec une offre hallucinante avec des milliers de références pour ne tourner pourtant qu’autour de ce genre musical.
Je me suis encore étalé sur des sujets… Peut-être est-il temps pour l’instant d’en venir au foot, et reparler plus tard du Japon et de Tokyo.
Tokyo Verdy - Urawa Reds
Le stade Ajinomoto est utilisé par les deux clubs de Tokyo : Tokyo Verdy et FC Tokyo. Les deux jouaient le même week-end mais je m’étais imposé de ne faire qu’un match. Si le Tokyo Verdy est un peu moins populaire, il était évident que c’était la meilleure affiche puisqu’Urawa Reds est probablement le club le plus populaire du pays avec la meilleure affluence (36 000). C’est un club de la ville de Saitama, donc comme le club de baseball dont j’ai parlé dans mon premier compte rendu. Une ville à priori “inconnue” du grand public (pas d’intérêt touristique) mais finalement assez imposante (1,3M d’habitants) avec également d'importantes salles (Saitama Super Arena, 37 000 places).
Le stade
Pour se rendre au stade Ajinomoto, il faut là aussi une bonne heure de transport. Il faut s’habituer au fait que Tokyo est gigantesque et donc qu’on a très rapidement une heure de transport pour aller à l’autre bout de la ville. Ce n’est pas le stade le plus attrayant, à ressembler aux stades nationaux assez ordinaires, où l’on se sent plutôt loin de la pelouse.
Mais encore une fois, le sens de l’accueil avec de nombreux stands sur un parvis devant le stade, des tables et des chaises.
L’offre est plus réduite une fois à l’intérieur. Perso j’ai pris dans le stade et j’ai notamment testé leur glace traditionnelle : kakigôri. De la glace pilée et du sirop. C’est pas très créatif, c’est pas cher, et ça n’a pas non plus de quoi me laisser un souvenir impérissable. On va leur laisser ce concept et ne jamais l’importer en France.
Le match et l’atmosphère
Les supporters de Tokyo Verdy et Urawa Reds se partagaient les tribunes. J’y ai retrouvé une ambiance avec les codes occidentaux habituels. Des nombreux drapeaux surtout côté Urawa, et la petite touche asiatique côté Tokyo Verdy puisque hôte avec des jeux de lumière pour utiliser des lightsticks.
Néanmoins la qualité du match était très faible et c’était difficile de s’enflammer dans un médiocre score nul et vierge.
L’expérience groundhopping
J’aurais préféré tomber sur un match d’Urawa à domicile. Mais le stade Ajinomoto reste un “classique” à faire sur Tokyo puisqu’il est utilisé par deux clubs ainsi que la sélection nationale. Sur mes vacances, il a été utilisé 3 ou 4 fois (Japon - Paraguay, Japon - Brésil). Les matchs de la sélection nationale paraissent plus alléchants car c’est complet très rapidement. Je suppose que l’ambiance y est passionnée. J’avais justement surveillé les ventes de Japon - Paraguay et les prix étaient très élevés avec des prix qui évoluent en fonction de la demande (une centaine d’euros en virage). J’ai refusé de mettre ce genre de prix. Mais je ne sais même pas s' ils auraient autorisé l’achat par un étranger.